Alors que le plupart se préparent à réveillonner jeudi prochain pour fêter le passage du vieil an à l’année nouvelle, vous êtes-vous déjà interrogés sur le pourquoi de cette tradition ? Et puis, la nouvelle année a-t-elle toujours commencé le 1er janvier ? Et puis encore, tous les peuples de la terre vivent-ils selon le même calendrier ? Zoom sur le temps, et sa relativité…
LE RENOUVEAU
Ce qu’on fête dans l’année nouvelle, c’est un renouveau. Celui de la nature. C’est pourquoi, le nouvel an se situe souvent, dans les régions tempérées, entre le solstice d’hiver et l’équinoxe de printemps. Solstice d’hiver : point de bascule de l’année où les jours vont progressivement s’allonger. Mort apparente de la nature, mais gestation du renouveau. Equinoxe : équilibre parfait du jour et de la nuit. Renaissance. Ainsi, le calendrier berbère place le nouvel an au 12 janvier ; le calendrier chinois, entre le 20 janvier et le 19 février. Mais cela n’est valable que sous nos climats. Le temps reste inéluctablement lié à l’espace. La situation géographique, la relation au ciel (astronomie et religion), le nombre de saisons influencent donc le repérage calendaire des êtres humains… Les musulmans, pour ne citer que leur exemple, sont passés à l’année 1437 en octobre dernier… La notion de renouveau, même si elle semble partagée par l’ensemble de l’humanité, ne se manifeste pas partout de la même façon.

Ainsi, les anciens Égyptiens commençaient leur année au moment de la crue du Nil, vers le 19 juillet. Pour les Romains d’avant Jules César, c’était les Ides de Mars qui marquaient le début. Un peu comme dans le calendrier perse zoroastrien, qui prenait l’équinoxe de printemps, le 21 mars, comme point de départ de l’année nouvelle. Pour les Hébreux, c’est Roch Hachana, début du calendrier lunaire, fiscal et agricole. Pour les musulmans, c’est aussi à peu près à cette date, puisque leur religion s’appuie aussi sur un calendrier lunaire. Dis-moi quand tu fêtes le nouvel an, je te dirai qui tu es… Calendrier solaire pour les sédentaires. Lunaire pour les peuples à tradition nomade. Solstice, équinoxe. Soleil, lune. Le renouveau n’est pas le même pour tous…

L’AN ZÉRO
Et puis, le point de départ n’est pas le même non plus. L’an « zéro ». Pour les musulmans, c’est l’hégire qui marque l’an zéro. L’hégire : le départ du prophète Mahomet de la Mecque pour l’actuelle cité de Médine, et la création de l’Islam. Selon notre calendrier, cet an zéro correspond à notre 16 juillet 622. La France a, elle aussi, connu des soubresauts calendaires : lors de la Révolution Française. Le calendrier républicain entre en vigueur le 15 vendémiaire an II (6 octobre 1793), mais débute le 1er vendémiaire an I (22 septembre 1792), jour de proclamation de la République, déclaré premier jour de l’« ère des Français ». Il sera utilisé de 1792 à 1806, ainsi que brièvement durant la Commune de Paris.

Ainsi, si ce calendrier était resté en vigueur, notre Président de la République nous aurait déjà présenté ses vœux le 22 septembre dernier, et nous serions en 217…
Placez votre main sur un poêle une minute et ça vous semble durer une heure. Asseyez vous auprès d’une jolie fille une heure et ça vous semble durer une minute. C’est ça la relativité.
DE LA LUNE AU SOLEIL
Et notre calendrier alors, de quand date-t-il ? Remontons aux anciens Romains, puisque notre tradition calendaire en est un héritage. Les Romains avaient placé leur « an zéro » à la création de Rome, en 753 avant JC. D’ailleurs, ils utilisaient l’abréviation AUC après chaque date évoquée. Ab Urbe Condita : « depuis la création de la ville ». Lui-même serait un héritage grec, et lunaire. Une année de 10 mois, de 30 jours chacun, et le premier de l’an tombe en mars ; ainsi septembre est bien le 7ème mois de l’année ; octobre, le 8ème ; novembre, le 9ème et décembre, le 10ème. Il faut attendre le roi Numa Pompilius, vers le VIIIème siècle avant JC, pour que soient inventés les mois de janvier et de février. Je vous passe les détails et les calculs, mais il a fallu inventer aussi un « 13ème mois » (et pas rémunéré celui-là !) pour rééquilibrer le nombre de jours par année. Le calendrier est modifié par Jules César, en 45 av. J.-C., en 709 AUC…

Le calendrier julien abolit les mois intercalaires ; il ajoute un jour au mois de septembre, pour rattraper progressivement le retard accumulé par l’ancien calendrier romain républicain. Le calendrier julien apporte une solution plus radicale car non calquée sur le cycle lunaire, et plus durable. Jules César préfère le soleil à la lune…
DE JULES À GRÉGOIRE
Notre calendrier, celui qui rythme nos jours, nos semaines, nos mois et nos années, a été établi en 1582, par le pape Grégoire XIII. D’où son nom : calendrier grégorien. L’an zéro : la naissance de Jésus Christ. Le calendrier grégorien reprend, en grande partie, les divisions du calendrier julien. Mais la grande innovation, c’est l’introduction des années bissextiles. Qui permettent de caler le temps des hommes sur la course du soleil. Qui permettent au printemps de toujours tomber un 21 mars. Qui permettent aux hommes de ne plus perdre leur temps… Ainsi, le calendrier grégorien est officiellement mis en place le vendredi 15 octobre 1582, le lendemain du jeudi 4 octobre 1582 ! Cette année-là, on passa du 4 au 15 en une nuit ! Évidemment, tous les pays n’adoptent pas ce nouveau calendrier tout de suite. Les pays où dominaient les cultes protestants (l’Angleterre ou la Suède par exemple) mirent du temps à l’adopter. L’astronome Kepler s’amusait à dire que les Protestants préféraient obéir au Soleil qu’au Pape… L’Église orthodoxe, elle aussi, met du temps à adopter ce nouveau calendrier. La Russie vit encore au rythme du calendrier julien jusqu’à la Révolution d’Octobre.
Le temps n’a qu’une réalité, celle de l’instant. Autrement dit, le temps est une réalité resserrée sur l’instant et suspendue entre deux néants.
Étrange n’est-ce pas, et vertigineux aussi, de se dire que le temps nous échappe… Que les dates ne sont que des nombres sur des calendriers de papier… Que les années n’ont pas d’importance… Que tout ça est invention humaine… Que seules comptent les courses de la Lune et du Soleil, et le retour du printemps…
Merci beaucoup pour cet article clair et efficace. Une remarque toutefois : l’an 0 n’existe pas, dans aucune des cultures mentionnées, comme vous le dites si bien à plusieurs reprises, un cycle commence toujours en l’an 1. D’où tout le débat qu’il y avait eu lors du passage au III e millénaire : 1 janvier 2000 ou 1 janvier 2001 ?
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Vous avez tout à fait raison ! Merci pour votre précision… Dois-je vous souhaiter une bonne année ? En tout cas je souhaite de vous croiser à nouveau par ici ! Cordialement. MarjorieTricot.
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[…] Depuis un peu plus de 500 ans, notre année civile commence le 1er janvier. Il n’en fut pas toujours ainsi. C’est Charles IX, guidé par sa mère Catherine de Médicis, qui, le 9 août 1564, publia, entre autres décisions, celle de faire commencer l’année le 1er janvier. C’est l’Édit de Roussillon, préparé et signé dans la ville de Roussillon, par, entre autres, Michel de L’Hospital (voir un précédent article du Mag@zoom à propos de cet homme bienveillant quoique méconnu : ici). Auparavant, le début de l’année variait selon les provinces : à Lyon, c’était le 25 décembre, à Vienne, le 25 mars, ailleurs encore le jour de Pâques… L’ Empereur d’Allemagne, Charles Quint, avait déjà fixé le début de l’année au 1er janvier dans son royaume. Et en 1622, le Pape Grégoire XV applique cette mesure à l’ensemble de la chrétienté. Il poursuit ainsi l’œuvre de son illustre prédécesseur, Grégoire XIII, qui s’était attaqué à la réforme du calendrier. Sur les tribulations du calendrier et du temps, voir, encore, un précédent article du Mag@zoom : là. […]
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[…] Un indice : ici. […]
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[…] Pour en savoir plus sur les calendriers qui rythment le temps, notre seul maître, c’est par ici… […]
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